En bref
Le 31 mai 2022
de 9h00 à 18h15
Misha (Université de Strasbourg)
5 allée du Général Rouvillois, 67000 Strasbourg
salle de Conférence
Tram C/E/F arrêt Observatoire
Entrée libre
Journée organisée par Moreno ANDREATTA et Isabelle MARC, avec le soutien du CREAA (groupes de travail « Musique et intermédialité dans le cyberespace » et « Théorisation et modélisation de l'acte artistique : approches mathématiques et computationnelles »), de l'UMR 7501 IRMA et de l'USIAS. La journée d’études est précédée d’un workshop animé par le musicien Matskat, lundi 30 mai 2022.
Souvent considérées comme les plus hautes expressions de l’esprit et la sensibilité humaine, par leur nature rythmique ou encore par leur caractère allusif, la musique et la poésie entretiennent des liens aussi forts que complexes. Elles ont à ce titre fait l’objet de maintes réflexions philosophiques, artistiques et académiques visant à interroger les fondements de ce « compagnonnage ».
Or, à l’ère du web, caractérisée par la rapidité, la fluidité et l’absence, voire l’impossibilité de contemplation, la poésie autant que la musique, comme s’il s’agissait d’expressions d’un autre temps, semblent avoir perdu leur aura : les publics de la poésie imprimée rétrécissent comme peau de chagrin et la musique, bien qu’omniprésente, fait l’objet d’écoutes le plus souvent distraites.
Dans ce climat d’accélération constante et exponentielle, on constate, toutefois, du moins en France, l’existence, voire l’essor, de nouvelles expériences musicales qui prennent la poésie écrite comme matériau de base : dans une démarche qui s’inscrit dans la voie jadis ouverte par Brassens, Ferré, Ferrat ou Gainsbourg, on assiste aujourd’hui à de nombreuses expériences de mise en chanson de textes poétiques à travers des approches stylistiques très variées. On citera, sans aucune prétention à l’exhaustivité, la fascination éprouvée par nombre de musiciens actuels pour des géants de la poésie française comme Charles Baudelaire (de Jean-Louis Murat à Arthur H, en passant par Camélia Jordana, BabX, Bertrand Louis ou François Atlas) aussi bien que pour des figures plus confidentielles telles que Marceline Desbordes-Valmore (de Julien Clerc à Pascal Obispo) ou Renée Vivien (dont treize poèmes ont été mis en chanson récemment par Pauline Paris).
Les exemples prouvent la continuité d’une tradition qui puise ses racines plus concrètes dans la chanson dite « poétique » de l’après-guerre. Or, ces musiciens qui s’emparent de la poésie, consacrée ou plus récente, font preuve de nouvelles stratégies esthétiques (musicales, performatives ou autres) qui marquent une rupture vis-à-vis de la tradition inaugurée par Brassens et ses confrères dans les années 1950 et 1960.
En favorisant le dialogue entre des universitaires issus de plusieurs horizons disciplinaires, des artistes ainsi que des acteurs du monde socioculturel (producteurs de label et organisateurs de Festival et initiatives pédagogiques et sociétales autour du rapport entre poésie et chanson) cette journée d’études cherche à s’interroger sur cette nouvelle tendance dans les musiques populaires actuelles en France et qui consiste à mettre en musique des textes poétiques préexistants : comment peut-on expliquer ce foisonnement à contrecourant des tendances culturelles majoritaires ? Quelle est son ampleur et sa diffusion ? Que nous disent ces albums « poétiques » du rapport à la tradition littéraire et musicale ? Dans quelle mesure représentent-ils des gestes nostalgiques ou des postures propres de l’avant-garde ? Comment réinvestissent-ils le fameux compagnonnage entre musique et poésie ?